Nétanyahou va trop loin
Israël a absolument le droit de se défendre, mais il y a un moment où la réplique devient disproportionnée. Nous y sommes.
Photo: Haim Zach (Israël Government Press Office)
Voici un dossier délicat, où beaucoup de nuances sont nécessaires, nuances que malheureusement ignorent plusieurs protagonistes, commentateurs et spectateurs.
Je me suis toujours considéré comme un ami d’Israël et du droit des Juifs d’avoir leur État, vivant en paix et en sécurité. Cela comprend le droit de se défendre contre les attentats terroristes. Les attentats du 7 octobre 2023, qui ont fait plus de 1200 morts, sont du terrorisme pur, dont les victimes sont des civils sans défense. Rien ne justifiait une telle attaque, dont on soupçonne que le but était de provoquer une réplique disproportionnée qui affaiblirait le capital de sympathie dont jouit Israël dans le monde. C’est exactement ce qui est arrivé. Le Hamas est le premier responsable des milliers de victimes de ce conflit, autant en Israël qu’à Gaza.
Cela dit, j’ai toujours cru aussi que la seule solution, à terme, est celle des deux États, vivant côte à côte, pacifiquement. Le premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou, n’y a jamais cru et a tout fait, tout au long de sa carrière politique, pour rendre cette solution impossible. Lui aussi porte une lourde responsabilité.
Le problème ici est de savoir si toute réplique israélienne, quelle qu’en soit la forme et l’intensité, est justifiée par les événements du 7 octobre. Ma réponse est non. Le droit de se défendre existe, bien sûr, de même que celui de combattre le Hamas. Mais le droit d’annihiler le peuple palestinien, ou de le forcer à s’expatrier, lui, n’existe pas. C’est là que le gouvernement Nétanyahou a mené Israël.
L’objectif supposé est de détruire le Hamas. Cet objectif ne sera jamais atteint, parce que le Hamas s’appuie sur la colère et la détresse des Palestiniens. Il en abuse, absolument. Mais tant que cette colère et cette détresse existeront, le Hamas survivra, sous une forme ou sous une autre.
J’appuie totalement la déclaration commune des premiers ministres canadien et britannique, et du président français, déplorant «l'extension des opérations militaires israéliennes à Gaza» et soulignant que «le niveau de souffrance humaine à Gaza est intolérable.»
La réponse du premier ministre Nétanyahou, accusant le trio de soutenir le Hamas et d’être «du mauvais côté de l'humanité et du mauvais côté de l'histoire» est grotesque. Associer au Hamas ceux qui osent contester la stratégie de Tel Aviv signifie que toute critique du gouvernement israélien serait interdite. Pourtant, beaucoup d’Israéliens dénoncent cette stratégie : sont-ils tous pro-Hamas?
Je sais que je vais m’attirer les foudres de ceux des Juifs du Québec qui associent toute critique d’Israël, dans le contexte post-7 octobre, à de l’antisémitisme. En autant que je suis concerné, je réfute d’avance et fermement une telle accusation. On ne trouvera nulle part dans mon parcours professionnel ou personnel une trace d’attitude négative à l’égard de la population juive au Canada ou en Israël, bien au contraire.
Je sais que beaucoup de Juifs sont angoissés par les attaques et les attentats perpétrés partout dans le monde, tout récemment à Washington. Je le comprends et je sympathise avec eux. Ces actes sont inexcusables. Il faut non seulement les condamner mais prendre tous les moyens pour éviter qu’ils ne se reproduisent.
Toutefois, tout cela ne justifie pas l’annihilation d’un peuple dont la grande majorité n’a rien à voir avec les attentats de l’automne 2023 et qui, lui aussi, a le droit de vivre en paix.
Vlad Vexler a dit, quelques mois après 7-oct que la question n'est pas entre:
A) essayer de tuer les civils
vs
B) ne pas essayer de tuer les civils
Mais plutôt entre:
a) essayer de tuer les civils
vs
b) ne pas essayer de tuer les civils
vs
c) essayer de ne pas tuer les civils.
Israël reclame de faire (b), mais devrait faire (c).
Est-ce que nous sommes les vrais amis d'Israël en leurs laisser faire les actions resultant en honte pour des generations? Sans aucun commentaire? Nous en avons fait dans notre passé.