La tentation autoritaire de M. Legault
Ce trait de la pratique politique du premier ministre ressort de plus en plus
(Photo Cabinet du premier ministre du Québec)
En fin de semaine, le premier ministre, François Legault, a approuvé les vives critiques adressées aux syndicats par les jeunes de son parti.
« Ça prend un certain cran pour parler des syndicats, parler des associations étudiantes, mais vous avez raison, a dit le chef de la CAQ dans son discours à l’occasion du congrès des jeunes caquistes. Voter des grèves après épuisement à 2 h du matin, ce n’est peut-être pas la meilleure façon de prendre des décisions importantes.» (Quand on sait que le projet de loi 69 a été adopté sous bâillon à 4h56 samedi matin, c’est un peu fort comme critique. J’y reviens plus bas.)
La déclaration suivante est plus révélatrice. Parlant de la Fédération autonome de l’enseignement, le premier ministre a ajouté: «Quand on voit entre autres un syndicat qui utilise l’argent des membres pour contester la loi 21 sur la laïcité, ce n’est peut-être pas ce qu’on souhaite au Québec ».
M. Legault et son gouvernement n’aiment pas les contre-pouvoirs. C’est pour cette raison qu’ils emploient la clause dérogatoire des chartes canadienne et québécoise des droits: pour éviter que des citoyens puissent recourir aux tribunaux dans l’espoir de bloquer des lois clairement discriminatoires.
M. Legault n’aime pas les médias, non plus. Samedi, il a invité les jeunes caquistes à ne pas «se laisser distraire par les critiqueux professionnels». D’ailleurs, il n’a pas rencontré les journalistes présents sur place, préférant accorder une «entrevue» au fils du ministre Bernard Drainville, un «tripeux de sports» de 28 ans, ex-attaché de presse caquiste, devenu influenceur.
Autre contre-pouvoir que le gouvernement de la CAQ trouve encombrant: la Régie de l’énergie. Dans ce dernier cas, le gouvernement est passé de la parole aux actes, en faisant adopter sous bâillon son projet de loi 69. Ce projet de loi réduit significativement les pouvoirs de la Régie en ce qui a trait à la détermination des tarifs et aux projets de développement d’Hydro-Québec. La nouvelle loi donne le champ libre à Hydro-Québec pour son méga-projet de développement de production électrique, au moment même où certains commencent à penser que ce plan repose sur des prévisions excessives de la croissance de la demande en électricité.
Au gouvernement, tous les partis politiques ont eu recours au bâillon à un moment ou à un autre. Ce qui est particulier ici, c’est que la CAQ a procédé ainsi après avoir déposé à la dernière minute 52 amendements à cette complexe pièce législative. Ces changements substantiels n’ont pu faire l’objet d’une étude et d’un débat sérieux.
Gouverner n’est pas facile et parfois très frustrant. Ça l’est d’autant plus quand on se fait critiquer plus souvent qu’à son tour et que les sondages nous sont défavorables. La tentation est alors forte d’attaquer de front tous ceux qui s’opposent légitimement aux décisions du gouvernement. Annoncer ce faisant que «ça va brasser» a de quoi plaire à une partie de l’électorat en mal d’un chef fort.
M. Legault cède de plus en plus à cette tentation autoritaire. Il ne faut pas prendre cela à la légère; à l’usure, l’autoritarisme affaiblit notre démocratie.
Je suis totalement d’accord avec vous. D’ailleurs, le traitement du regroupement familial est un autre dossier dans lequel ce gouvernement agit de manière autoritaire.
Nous avons distingué la source de notre mal. Quel en est le remède?